2/3 - ACT : six processus, une seule mission (vivre une vie qui vous ressemble)
Si vous avez lu le premier article, félicitations, vous connaissez maintenant les 6 processus de la thérapie ACT : défusion, acceptation, soi comme contexte, moment présent, valeurs et action engagée. Mais comment s’articulent-ils dans la vraie vie, quand on n’est pas en train de lire un article tranquillement, mais plutôt en train de paniquer un dimanche soir ou d’éviter toute forme d’intimité émotionnelle ? C’est ce que nous allons explorer ici.
Petit rappel express
Avant de plonger dans le concret, imaginez ces 6 processus cognitivo-émotionnels comme les instruments d'un orchestre qui doivent jouer en harmonie. Chacun a sa partition :
- Défusion : séparer les pensées de la réalité (un réflexe cognitif à mettre en place. "Je suis nul" devient "J’ai la pensée que je suis nul").
- Acceptation : faire de la place aux émotions désagréables sans lutter.
- Soi comme contexte : se reconnecter à un soi stable, capable d’observer.
- Moment présent: être là, maintenant, et non dans le futur imaginaire.
- Valeurs : identifier ce qui compte réellement pour vous.
- Action engagée : avancer dans la direction de vos valeurs, même avec le trac.
Ces six processus fonctionnent main dans la main : activer l’un, c’est forcément mobiliser les autres. Ensemble, ils constituent ce que l’on appelle la flexibilité psychologique.
Situation 1 : Le syndrome du dimanche soir
Lucie, 34 ans, sent un nœud dans le ventre chaque dimanche à 19h. Rien de grave, dit-elle, "juste une montée d’angoisse, comme un prélude tragique à la semaine à venir".
Comment l’ACT s’invite dans cette histoire :
Défusion : Lucie se surprend à penser "je vais encore tout rater cette semaine". En ACT, elle apprend à dire : "Tiens, je remarque que j’ai la pensée que je vais rater ma semaine."
Acceptation : plutôt que d’ouvrir une troisième tablette de chocolat pour calmer l’anxiété, Lucie apprend à accueillir cette tension comme une vague qui monte et redescend.
Moment présent : elle redirige son attention : le contact du canapé, les bruits autour d’elle.
Soi comme contexte : elle découvre qu’elle n’est pas seulement "Lucie l’angoissée", mais aussi celle qui observe et choisit.
Valeurs : pourquoi aller travailler ? Transmettre, aider ses collègues, progresser… autant de choses qui comptent.
Action engagée : elle prépare une tâche motivante pour lundi matin : rédiger une fiche créative pour ses élèves. L’anxiété reste là, mais elle agit avec sens.
Situation 2 : Tout contrôler (surtout les émotions)
Hugo, 28 ans, évite systématiquement les soirées, les rendez-vous, les entretiens. "J’ai besoin d’être sûr de moi. Quand je le serai, je vivrai." Spoiler : il attendra longtemps.
Ce que propose l’ACT :
Défusion : "Je dois être sûr de moi avant d’agir" devient une pensée à observer, pas une vérité absolue. De plus, on dit en psychothérapie que c'est un impératif rigide, une sorte de pensée dictatoriale qui oblige. Il est très important de les reconnaitre comme telles.
Acceptation : accueillir la peur du jugement comme faisant partie du kit de démarrage d’un humain sensible.
Soi comme contexte : Hugo apprend qu’il peut être celui qui doute et celui qui agit.
Moment présent : lorsqu’il se perd dans des scénarios catastrophe, il revient à l’ici-maintenant : ses sensations, ce qu’il voit, ce qu’il entend.
Valeurs : derrière sa peur, il découvre son envie de lien, de complicité, d’humour partagé.
Action engagée : il accepte d’aller à une soirée, sans objectif de briller, mais en suivant sa valeur de connexion.
L’ACT n’est pas une recette miracle
L’ACT n’est pas une baguette magique qui efface vos symptômes à la première application. Ce n’est pas non plus un programme rapide pour “transformer votre vie”.
C’est un entraînement à la flexibilité psychologique. Comme le sport, cela fonctionne si on pratique, si on trébuche, si on recommence. Il n’y a pas de ligne d’arrivée, seulement un chemin vers ce qui vous importe.
Conclusion
Les 6 processus de l’ACT ne sont pas faits pour fonctionner séparément. Ils s’entrelacent, se répondent, s’adaptent. Parfois, l’un prend le relais, parfois c’est toute l’équipe qui se mobilise. Le but n’est pas un bonheur garanti, mais une vie riche de sens, même avec ses cicatrices. Qualité versus quantité.
Dans le troisième article, nous verrons ce que l’ACT n’est pas (scoop : ce n’est pas de la pensée positive, ni une thérapie "zen"). Nous aborderons aussi les malentendus fréquents, que vous soyez praticien ou simplement curieux de mieux comprendre cette approche pragmatique proposée par votre psychologue.